L’histoire de cette soupe de champignons au sarrasin a commencé par un dîner au restaurant en amoureux avec Maxence.
Avec deux petits garçons et des vies professionnelles bien remplies, nous nous offrons régulièrement les services de baby-sitters, afin de profiter de soirées juste entre adultes. Nous allons parfois voir un film (un film ! dans un vrai cinéma ! incroyable !), nous voyons parfois des amis (de vraies conversations ! sans aucune interruption ! gros mots autorisés !), nous allons parfois à une soirée (une vraie fête ! avec de la musique ! où on danse ! c’est presque trop !), mais la plupart du temps, nous nous contentons de dîner tous les deux dans un restaurant de notre quartier qui – pour notre plus grand bonheur – regorge d’adresses recommandables.
J’éprouve un enthousiasme démesuré pour ces soirées. Je crois que c’est l’un des nombreux cadeaux un peu tordus que la vie vous offre en même temps que des jeunes enfants : vous avez beaucoup moins de temps pour vous, c’est vrai. Mais quand une fenêtre de pure liberté se présente, vous en profitez à fond et vous la savourez jusqu’à la dernière goutte comme s’il s’agissait du nectar des dieux.
Ce soir-là, nous avons décidé d’aller au Pigalle. C’est un petit hôtel branché dans le quartier qu’on appelle parfois SoPi (South of Pigalle). C’est un surnom qui a été lancé comme une blague il y a douze ans, mais qui, contre toute attente, lui est resté. (Même si je n’ai jamais vu personne le prononcer sans simultanément lever les yeux au ciel, hausser une épaule d’un air blasé, ou ajouter des guillemets avec les doigts. Mais peut-être que je n’évolue pas dans les bons cercles. Pas que j’évolue dans tellement de cercles d’ailleurs. Je ne suis pas très cercle.)
Bref. Le rez-de-chaussée du Pigalle héberge un café-bar-restaurant, mais ça n’a rien à voir avec ces halls d’hôtel feutrés, où la qualité de l’air semble changer au moment où vous entrez, et où vous sentez qu’à tout moment on peut vous demander votre avis d’imposition pour vérifier que vous avez bien le droit d’être là. Là, pas du tout. C’est un restaurant branché, certes, mais décontracté, qui sert des petites assiettes simples, élaborées à partir d’ingrédients des artisans du quartier, comme les fromages du fromager du bas de la rue des Martyrs, ou le pain au levain à la croûte magnifique de Thierry Breton, rue de Belzunce.
Il est annoncé d’emblée sur la carte que la cuisine proposée relève plus de la cuisine d’assemblage que de la vraie cuisine, mais nous avons vite compris que c’était juste de la modestie. Nous avons été enchantés par les préparations dégustées ce soir-là, d’une fraîcheur éclatante et à l’assaisonnement parfait, un assortiment de classiques français avec le petit truc en plus, tout en humilité et en précision.
J’ai notamment eu le coup de foudre pour la soupe de champignons au sarrasin, servie avec un œuf poché. Tellement simple, tellement efficace ! Les notes fumées du sarrasin faisaient écho à la saveur de sous-bois des champignons, et le velouté de l’œuf poché contrastait avec le croustillant délicieux du sarrasin grillé.
C’est exactement le genre de plat qui me ravit, et il ne m’a pas fallu longtemps pour réaliser ma propre version, que je partage avec vous aujourd’hui.
Il n’y a pas plus simple à réaliser que cette soupe ; vous pouvez même utiliser des champignons surgelés pour réduire le temps de préparation.
Je vous conseille d’utiliser des graines de sarrasin non grillées (les petites graines jaune-vert), par opposition à la kasha (les graines brun-rouge), pour une saveur plus délicate qui ne l’emportera pas sur les champignons. C’est la première fois que je fais griller du sarrasin pour une garniture, et ce ne sera pas la dernière : quelle jolie façon d’ajouter du croustillant à une soupe !
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Ingrédients
- 1 c.s. d'huile d’olive ou autre matière grasse
- 1 oignon jaune moyen, finement émincé
- 1 gousse d’ail, coupée en deux
- 1 c.c. de sel de mer fin
- 800 g de champignons de Paris, coupés en quatre
- 150 g de sarrasin cru (les graines claires avec des reflets verts, et non la kasha, qui est brune avec des reflets rouges)
- 480 ml de bouillon de légumes ou de poulet, maison de préférence
- 6 œufs pochés ou mollets, pour servir
- Quelques tiges de persil plat, hachées finement, pour servir
- Poivre noir du moulin
Instructions
- Faites chauffer l’huile d’olive dans une cocotte. Ajoutez l’oignon émincé, l’ail et le sel, et faites cuire 3 à 4 minutes, en remuant régulièrement, jusqu’à ce que tout soit bien souple.
- Ajoutez les champignons, remuez et laissez brunir 5 minutes, en remuant régulièrement.
- Ajoutez 100 g de sarrasin (réservez le reste pour saupoudrer), versez le bouillon et 480 ml d’eau, couvrez et portez à frémissement.
- Laissez frémir 12 à 15 minutes, jusqu’à ce que les champignons soient cuits et que le sarrasin ait “éclos”.
- Pendant ce temps, faites griller le sarrasin restant dans une poêle sèche sur feu moyen jusqu’à ce qu’il soit doré. Versez dans un bol, ajoutez le persil haché finement et réservez.
- Versez la soupe dans le bol d’un blender à haute performance et mixez jusqu’à ce qu’elle soit complètement lisse (vous pouvez aussi utiliser un mixeur plongeur directement dans la cocotte). Si besoin, ajoutez un peu d’eau pour obtenir une texture bien veloutée. Goûtez et rectifiez l’assaisonnement.
- Répartissez entre six bols peu profonds et disposez un œuf au milieu de chaque portion de soupe. Saupoudrez de sarrasin grillé et de persil, d’un peu de poivre noir du moulin, et servez.
Photos réalisées par Céline de Cérou.
