Laurence est l’une de mes meilleures et de mes plus vieilles amies. Je l’ai rencontrée à quatorze ans, au premier jour de notre entrée au lycée, et nous sommes rapidement devenues inséparables, si semblables à tout point de vue qu’on nous prenait parfois pour des soeurs.
J’adorais aller chez elle après les cours. D’abord, il y avait une télévision, ce qui n’était pas le cas chez mes parents — le grand drame de notre vie à ma soeur et à moi — donc il y avait toujours la perspective palpitante de regarder l’une ou l’autre des émissions dont tout le monde parlait à l’époque.
Mais au-delà de ça, c’était une grande et joyeuse maison où l’on se sentait bien : Laurence avait deux soeurs, et leur mère, Christine, gardait de jeunes enfants, donc il y avait toujours beaucoup d’allées et venues, de conversations, de gens qui sonnaient à la porte et de voix de filles criant dans l’escalier.
Fins et croustillants, délicatement beurrés et parfumés d’un murmure de cannelle, c’étaient des sablés tout simples en apparence, mais qui vous faisaient fermer les yeux pour mieux écouter le minuscule orchestre symphonique qui se mettait à jouer dans votre bouche.
Laurence et moi faisions un premier passage par la case cuisine pour l’incontournable goûter, avant de filer au dernier étage nous enfermer dans sa chambre pour parler sans interruption pendant des heures, comme on en est capable quand on a quatorze ans.
Dans cette cuisine, il y avait souvent du pain et du nutella, parfois un gâteau au yaourt, et toujours de très bons yaourts maison au lait entier dans le frigo. Et je me souviens aussi que chaque année, au moment des fêtes, il y avait une boîte de biscuits de Noël que Christine avait faits.
Fins et croustillants, délicatement beurrés et parfumés d’un murmure de cannelle, c’étaient des sablés tout simples en apparence, mais qui vous faisaient fermer les yeux pour mieux écouter le minuscule orchestre symphonique qui se mettait à jouer dans votre bouche.
Une dizaine d’années plus tard, il m’est enfin venu l’idée de demander à Christine si elle voulait bien me donner sa recette, ce qu’elle a fait de bonne grâce, en précisant qu’elle ne la faisait qu’une fois par an, à l’approche de Noël. Je fais donc de même, ce qui me coûte un peu parce que ces biscuits sont vraiment délicieux, mais la tradition, c’est la tradition.
C’est une recette qui ne présente aucune difficulté particulière, et je ne l’ai modifiée que marginalement, en diminuant un peu la quantité de sucre, en ajoutant du sel, et en remplaçant la cuillerée à soupe de rhum par la même quantité de mon extrait de vanille maison. Il faut faire reposer la pâte une nuit au frais, et ensuite il n’y a plus qu’à l’étaler finement, la découper à l’emporte-pièce, et cuire fournée après fournée, en faisant semblant de diriger une petite usine à biscuits.
Ma production de cette année est sans aucun doute la meilleure que j’aie jamais réalisée : j’ai utilisé la farine qui est vendue à la boulangerie Poilâne : il s’agit de la farine moulue à la meule de pierre qui sert à faire leur pain, bien sûr, mais surtout leurs punitions. Du coup, mes biscuits de Noël ont un parfum très proche de celui de ces mythiques sablés, et c’est exactement ce que j’espérais.
Bien sûr, vous pouvez décorer les biscuits avec du glaçage et des paillettes si c’est votre truc, mais moi je leur préfère largement ce look anti-bling, et je trouve qu’ils font un très joli cadeau gourmand juste comme ça, empilés tête-bêche dans une boîte garnie de papier de soie.
Pour plus d’idées de cadeaux qui se mangent, vous pouvez consulter les billets suivants :
~ Granola fait maison,
~ Extrait de vanille fait maison,
~ Sablés diamant au matcha,
~ Billes de noisette au chocolat,
~ Bouchées croustillantes au chocolat,
~ Infusion maison,
~ Guimauve à la rose ou au chocolat.
Joyeuses fêtes !
Vous aimez cette recette ? Partagez vos photos sur Instagram !
Ajoutez le tag #cnzrecipes aux photos de vos réalisations. Je partagerai mes préférées !
Ingrédients
- 420 g de farine T80, plus de quoi fariner le plan de travail (j'ai utilisé la farine vendue chez Poilâne)
- 280 g de sucre (j'utilise du sucre blond de canne non raffiné)
- 1/2 c.c. de cannelle en poudre (j'utilise la cannelle fraîche de Cinnamon Hill)
- 1/2 c.c. de sel fin (j'utilise du sel gris non raffiné)
- 2 gros oeufs
- 1 c.s. d'extrait de vanille fait maison
- 250 g de beurre doux (le meilleur possible), coupé en dés et ramolli (je le laisse à température ambiante 2h environ)
Instructions
- Préparez la pâte au moins 8h à l'avance, et jusqu'à 24h. Dans le bol d'un mixeur, mélangez la farine, le sucre, la cannelle et le sel. Ajoutez les oeufs et la vanille, et mélangez bien.
- Ajoutez le beurre en petites parcelles, et mélangez jusqu'à ce qu'il soit incorporé avant d'en ajouter un autre morceau. La pâte sera assez molle ; elle se raffermira au frais. (Si vous voulez la faire à la main, je vous invite à imiter les gestes de Lionel Poilâne dans cette video, lorsqu'il prépare ses mythiques punitions.)
- Divisez la pâte en quatre morceaux (à peu près) égaux, façonnez chaque morceau en un disque épais, emballez-les dans du film plastique et laissez reposer au réfrigérateur au moins 8h, et jusqu'à une journée.
- Chemisez des plaques de four avec des tapis de cuisson en silicone ou du papier sulfurisé. (Pour une productivité optimale, il vous faut trois plaques, afin qu'à tout moment vous puissiez en avoir une dans le four, une que vous être en train de garnir, et une qui refroidit.)
- Préchauffez le four à 160°C.
- Sortez un morceau de pâte du réfrigérateur. Sur un plan de travail bien fariné (idéalement, une surface en marbre, pour que la pâte ne se réchauffe pas trop vite) et à l'aide d'un rouleau à pâtisserie bien fariné, étalez la pâte sur une épaisseur de 2 à 3 mm. Pour éviter que la pâte ne colle au plan de travail, il faut la déplacer légèrement à chaque passage du rouleau, et jeter un peu de farine en-dessous (on dit "fleurer" pour faire sérieux) quand elle commence à coller.
- Petite astuce en cadeau : j’utilise deux baguettes chinoises comme des “rails” pour étaler la pâte de façon uniforme au départ, puis les retirer pour l’étaler plus finement.
- Découpez les formes de votre choix à l'aide d'un emporte-pièce, et disposez-les sur une plaque de four (qui doit être à température ambiante, et non chaude). Les biscuits ne s'étaleront pas vraiment pendant la cuisson, donc vous pouvez les serrer un peu (mais sans excès). Rassemblez les chutes en boule, en évitant de trop manipuler la pâte pour éviter de trop la réchauffer, et étalez-la à nouveau autant de fois que nécessaire pour découper d'avantage de biscuits. Si elle devient trop molle, remettez-la au frais pour la raffermir.
- Insérez la plaque au milieu du four et laissez cuire 12 à 15 minutes, jusqu'à ce que les biscuits soient dorés, mais avant qu'ils ne brunissent. Ils seront encore un peu mous, mais devraient tenir sur la pointe du couteau. Si la forme que vous avez choisie est un peu fragile par endroits (dans le cas de mes bonshommes, légère faiblesse au niveau du cou), laissez les biscuits 1 à 2 minutes sur la plaque avant de les transférer sur une grille pour les laisser refroidir.
- Recommencez l'opération avec les autres morceaux de pâte, en laissant les plaques refroidir complètement avant de les réutiliser.
- Les biscuits se gardent un mois dans une boîte hermétique à température ambiante.
Notes
Bien sûr, le nombre de biscuits dépend de la taille de votre emporte-pièce : le mien fait 7 cm de hauteur, et j'ai obtenu 12 douzaines de biscuits, pour un poids total de 960 g.