Avant, je faisais partie des gens qui préfèrent le blanc dans le poulet rôti.
C’était pratique dans ma famille, puisque mes parents pouvaient prendre chacun une cuisse pendant que leurs filles mangaient leurs blancs avec délice : c’était doux au goût, il n’y avait pas à croiser le fer avec les os, et on avait droit à autant de jus qu’on voulait, versé sur la viande après y avoir pratiqué des entailles en croisillons pour que ça absorbe bien.
Ça permettait aussi une distribution harmonieuse entre Maxence et moi, puisque lui a toujours été dans le camp de ceux qui préfèrent qu’il y ait des os à ronger. On pouvait donc acheter un poulet rôti entier et travailler dessus de façon symétrique sur les deux ou trois repas suivants.
Mais depuis peu, j’ai retourné ma veste et admis, après des années de déni, que quand même, les cuisses, c’est vrai que c’est meilleur.
Cette sauce merveilleusement veloutée est parfaite avec le poulet et les radis, mais je garde aussi la recette en tête pour une salade croquante (avec des endives ou un pain de sucre, ça doit être fameux), des asperges vertes, ou des coeurs d’artichaut.
C’est un peu un problème. Même si notre rôtisserie chérie est extraordinaire, elle ne l’est pas au point de proposer des poulets à quatre cuisses et sans blanc (n’essayons même pas d’imaginer une telle créature), donc je me suis mise en quête d’idées pour utiliser ces blancs de poulet d’une façon un peu créative.
La salade d’aujourd’hui est une recette printanière qui me plaît beaucoup : le blanc de poulet est coupé en bouchées et mélangé à des radis multicolores dans une sauce légère à l’avocat, faite avec du fromage blanc et des herbes fraîches. La viande fondante, les radis croquants et la sauce onctueuse forment un équilibre de texture idéal.
Ladite sauce est inspirée du dernier livre d’Alice Waters*, In the Green Kitchen, dont j’ai reçu un exemplaire presse. Sous-titré Techniques to learn by heart (littéralement, « des techniques à apprendre par coeur », mais ça fait beaucoup moins scolaire en V.O.), c’est un recueil de techniques et de recettes proposées par les chefs et cuisiniers qu’elle admire le plus.
Les ving-sept chapitres couvrent des sujets variés (préparation d’un bouillon, cuisson des fruits au four, pochage des oeufs…) avec dans chaque cas une petite bio de la personne en question (et de beaux portraits chaleureux qui bondissent de la page), une explication de la technique et quelques recettes pour la mettre en pratique — cinquante-six en tout.
Au premier abord, on pourrait penser que c’est un livre qui s’adresse aux débutants, et ce serait effectivement un très joli encouragement à offrir à quelqu’un qui veut se mettre à la cuisine. Mais comme je l’ai déjà écrit ici, je crois en la maîtrise de plats simples et classiques, et je pense que même les gens qui cuisinent depuis des années gagnent à consulter des livres qui présentent des techniques de base, histoire de comparer leur façon de faire à celle de l’auteur.
Personnellement, j’ai noté des astuces et marqué les pages de recettes que je testerai à la première occasion (le cornbread, l’épaule de porc braisée, la galette aux pommes…), et j’ai tout de suite eu envie d’essayer le green goddess dressing (littéralement, assaisonnement de la déesse verte) présenté en page 14 et servi avec des coeurs de salade romaine. Il s’agit d’une version sans mayonnaise de cette célèbre sauce de salade, qui utilise ici un avocat écrasé, de la crème liquide et de l’huile d’olive pour obtenir une texture crémeuse. J’ai gardé l’idée dans les grandes lignes, en remplaçant la crème par du fromage blanc, et sans mettre d’huile parce que ça ne me semblait pas indispensable.
C’était parfait avec le poulet et les radis (vous savez ce que je pense du mariage radis + avocat), mais je garde aussi la recette en tête pour une salade croquante (avec des endives ou un pain de sucre, ça doit être fameux), des asperges vertes, ou des coeurs d’artichaut.
Précision importante, cette sauce doit être faite à la dernière minute : si on le fait trop attendre, l’avocat se vexe et devient tout gris.
Et si vous avez envie de me faire part de vos idées pour ces fameux blancs de poulet, je me tiens prête, calepin à la main !
* Alice Waters, co-propriétaire du restaurant Chez Panisse à Berkeley en Californie, est l’un des figures fondatrices de la cuisine californienne. Aux Etats-Unis, elle milite de façon très active pour le locavorisme et le respect des saisons, l’agriculture biologique et la promotion des petits producteurs, l’éducation du goût dans les écoles et les potagers pédagogiques, et le retour de tous en cuisine pour une vie plus équilibrée et plus saine.