Archives février 2010

Crumble aux épices et beurre noisette

Crumble aux épices et beurre noisette

Quand on invite des amis à dîner et qu’on ébauche le menu, la première préoccupation devrait être à mon humble avis le réalisme. L’idée, c’est d’équilibrer les différents plats en terme de goût et de style, mais aussi et surtout du point de vue de la charge de travail — d’autant que, même quand on n’a pas les deux mains dans la même manique, les choses prennent toujours plus de temps qu’on ne croit.

Alors si je prévois un plat principal un peu élaboré, j’en déduis que j’aurai moins de temps et d’énergie à consacrer au reste, et mon joker dessert est souvent le crumble. (Le trifle aussi, mais on en reparlera un autre jour.)

Un crumble, ça demande très peu d’effort (on prépare la pâte à crumble, on coupe les fruits, on saupoudre, et zou, on enfourne), ça se porte en toute saison (on fait avec les fruits disponibles au marché), ce n’est pas capricieux sur le timing (on peut faire la pâte à crumble la veille, cuire le tout dans l’après-midi, et réchauffer juste avant de servir), et surtout, tout le monde aime ça : c’est un modèle de douceur, de réconfort et de simplicité, et même ceux qui ne se resservent jamais jamais sont susceptibles d’être surpris la cuiller dans le plat qu’ils rapportaient gentiment à la cuisine.

La recette d’aujourd’hui est adaptée du livre The Last Course, de Claudia Fleming, dont je parlais dans mon meilleur de 2009 et qui est malheureusement épuisé.

Elle y apparaît sous la forme d’un Spiced Italian Prune Plum Crisp (croustillant* de prunes italiennes aux épices, l’Italian prune plum en question étant manifestement une prune un peu quetsche) et j’étais très intriguée par la pâte à crumble, parfumée à la cannelle et à la cardamome, et dont les proportions étaient assez différentes de ma formule habituelle.

La recette utilise notamment du beurre fondu, au lieu du beurre froid que l’on sable habituellement du bout des doigts dans les ingrédients secs. Et depuis que nous avons appris à vivre sans micro-onde, je fais fondre le beurre de deux façons : soit je mets à profit l’énergie du four qui préchauffe, comme décrit ici, soit je le fais fondre dans une casserole, à l’ancienne, quoi. Et quand je choisis cette deuxième méthode, ça ne rate jamais, je suis tentée de pousser le bouchon un cran plus loin, et faire un beurre noisette.

En effet, du beurre fondu au beurre noisette il n’y a qu’un pas — quelques minutes de cuisson supplémentaires au-delà de l’ébullition — récompensé par un beurre au goût plus complexe et plus intense, que l’on peut ensuite utiliser normalement.

Il faudra que attendre encore quelques mois pour faire l’essai avec des quetsches, mais en attendant, la version beurre-noisettisée de cette pâte à crumble (que j’ai par ailleurs modifiée pour utiliser de la farine de noisette, un peu moins de sucre, et ajouter du sel et du poivre) est délicieuse sur des pommes (je prends généralement un mélange de canada et de golden pour mes crumbles), et devrait être tout aussi convaincante sur de la rhubarbe, des pêches, des abricots ou des mangues.

Un mot sur la cardamome : la recette d’origine préconise d’utiliser 1/8 c.c. de cardamome en poudre, mais comme la cardamome s’évente vite une fois moulue, je préfère stocker des gousses entières (seules dans un bocal super ultra hermétique, sinon tout le placard sent la cardamome et c’est affreux) et moudre les graines à la minute, dans un mortier miniature acheté dans un vide-grenier à l’époque où j’habitais en Californie.

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* Les américains utilisent aussi le terme crisp (croustillant) pour désigner une préparation de type crumble. Certains disent qu’un crisp devient un crumble dès lors que la pâte contient des flocons d’avoine, d’autres disent que c’est l’inverse, et ceux qui ne se prononcent pas utilisent les deux termes de façon interchangeable.

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Baguettes au levain

Recette de baguette

Lorsque j’ai commencé à faire mon pain de façon régulière, je considérais la recette de la baguette comme chasse gardée du boulanger : j’avais l’intention de faire des pains comme je les aime — avec une belle croûte (mais pas trop sombre en dessous), une mie alvéolée (mais quand même assez serrée pour être tartinée), un goût bien développé par une fermentation lente, et un mélange de farines bio blanches et semi-complètes — mais je continuerais à aller chercher ma baguette Piccola tout chaude chez Coquelicot, place des Abbesses.

Et puis au bout d’un moment, après avoir fait suffisamment de boules au levain cuites en cocotte (en pyrex en l’occurrence) pour que mon levain et moi soyons vraiment bons amis, j’ai décidé de passer à l’étape de la cuisson sur pierre.

Dès le premier essai, j’étais euphorique : de belles grignes, une croûte bien croustillante, une mie vibrante et alvéolée, et un bon goût bien typé.

La pierre de cuisson* (appelée aussi pierre à pizza ou pierre à pain, à ne pas confondre avec la pierre à pierrade), c’est une dalle en pierre réfractaire que l’on place dans le four : elle absorbe la chaleur pendant le préchauffage, la garde même quand on ouvre et ferme la porte du four, ce qui permet de maintenir une température à peu près constante, et la diffuse en continu. C’est d’autant plus idéal pour la boulange que les pains que l’on cuit dessus lèvent particulièrement bien : au lieu de s’étaler un peu avant de lever, la pâte à pain a l’air super motivée pour pousser vers le haut dès l’instant où elle entre en contact avec la pierre brûlante (on la comprend).

C’est décidé, je m’attaque à la recette de la baguette !

Les premiers pains que j’ai cuits sur pierre étaient des bâtards — des pains de forme ovale allongée — parce que c’est facile d’en faire tenir deux sur ma pierre carrée, et j’ai remarqué que j’obtenais une mie plus aérée que quand je faisais des boules. Quelques fournées plus tard, je me suis dit, après tout, une baguette, c’est juste un bâtard en plus étroit, non ? Alors pourquoi ne pas faire des baguettes ?

Les baguettes que l’on achète chez le boulanger sont rarement au levain naturel, et quand elles sont vendues comme telles, l’action du levain est généralement couplée à celle de la levure de boulanger (ça vaut la peine de demander). La farine qui est utilisée est une farine blanche qui contient souvent des additifs, et ce sont ces deux caractéristiques qui expliquent la mie filante et alvéolée des baguettes du commerce.

Calendrier des fruits et légumes

Une recette de baguette au levain

De mon côté, ce que je voulais faire, c’était une baguette au levain seul, faite avec un mélange de farines bio incluant de la farine bise et de l’intégrale, donc je savais que je n’obtiendrais pas exactement la même texture, mais ça ne me posait aucun problème.

Après avoir lu les compte-rendus de quelques boulangères expérimentées pour bien comprendre comment elles faisaient, et visionné quelques vidéos sur le façonnage, je me sentais parée à l’abordage.

Et effectivement, dès le premier essai, j’étais euphorique : des incisions largement ouvertes et formant de belles grignes (les lignes de crête sur le dessus des baguettes), une croûte suffisamment croustillante pour émettre un délicieux crépitement quand on presse la baguette, une mie vibrante et alvéolée, et un bon goût bien typé.

J’aimerais mettre en bouteille ce que je ressens lorsque j’observe mes baguettes qui se développent à vue d’oeil, que je les retire du four grâce à ma super pelle et que je les écoute gazouiller en refroidissant.

J’en ai fait un certain nombre depuis, et si je pouvais mettre en bouteille ce que je ressens lorsque j’observe mes baguettes qui se développent à vue d’oeil, que je les retire du four grâce à ma super pelle et que je les écoute gazouiller en refroidissant, je crois que les fabricants d’anti-dépresseurs auraient du souci à se faire.

Cela dit, on continue à aller chercher des baguettes chez Coquelicot régulièrement, surtout lorsque nous avons des amis à la maison : je trouverais ça chouette de servir un repas fait maison jusqu’au croûton des baguettes, mais ce n’est pas très réaliste de préparer le dîner et faire du pain le même jour — du moins, si je veux rester éveillée jusqu’à la fin de la soirée. Mais j’ai remarqué qu’on est rarement mal accueilli quand on apporte du pain maison en cadeau chez les autres, donc c’est une bonne façon de le faire goûter.

Quelques précisions sur ma recette de baguette

Je précise que mes baguettes sont en fait des demi-baguettes, puisque je suis limitée par la largeur de mon four. On peut les faire plus minces et appeler ça des ficelles ou des flûtes, en divisant la pâte en six pâtons plutôt que quatre, mais alors il vaut mieux les cuire en deux fournées, pour maintenir une bonne circulation de la chaleur tout autour. A l’inverse, on peut diviser la pâte en deux pâtons seulement et faire des bâtards. Dans tous les cas, il faudra ajuster le temps de cuisson à la taille des pains.

Comme la pâte doit reposer au frais 12 à 24 heures, c’est une recette flexible qui peut s’adapter à vos contraintes d’emploi du temps. En général, je nourris le levain le matin du premier jour, je prépare la pâte dans l’après-midi quand il est mûr, et je cuis les baguettes le lendemain, dans la matinée ou l’après-midi.

Recette de baguette au levain

* Ce type de pierre est très répandu aux Etats-Unis, mais moins en France, semble-t-il ; la mienne était livrée comme accessoire avec mon four de marque italienne. On en trouve sur eBay et sur quelques boutiques en ligne, mais faute d’avoir testé, je ne peux pas vous conseiller un fournisseur en particulier. Si quelqu’un veut émettre une recommandation dans les commentaires, ce sera sans doute utile à d’autres !

En tous cas, je vous conseille d’en choisir une qui soit carrée ou rectangulaire plutôt que ronde — c’est un format plus versatile — et n’oubliez pas de vérifier que sa taille conviendra aux dimensions de votre four (la mienne fait 36 x 34 cm et 1 cm d’épaisseur). Assurez-vous également qu’elle est livrée avec une pelle en bois qui permettra d’enfourner pains et pizzas sans vous brûler.

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Votre Pain : un nouveau site et un concours

Boule au levain
Photo de Florence.

Ça ne vous aura pas échappé, je me passionne depuis quelques temps pour la boulange au levain naturel. Cela ne fait pas tout à fait un an, donc j’estime être encore au début de mon apprentissage, mais à raison d’un pain par semaine, sans compter toutes les heures passées à consulter sites, blogs, forums et livres dédiés au sujet, on apprend vite.

La source francophone grâce à laquelle j’ai le plus progressé, c’est sans conteste le blog de Florence, qui devrait être décorée de la médaille d’honneur de la boulange, tant elle consacre de temps et de gentillesse à informer et à aider ceux qui veulent mettre (littéralement) la main à la pâte.

C’est justement Florence qui a eu l’initiative de créer ce nouveau site appelé Votre Pain, qui a vocation à animer la communauté panophile francophone, et réunir en un seul endroit des discussions sur les techniques, les expérimentations et les recettes des uns et des autres. Les sources anglophones foisonnent dans ce domaine, mais c’est nettement moins le cas en français.

Pour inaugurer le site, Florence a eu l’idée d’organiser un concours intitulé Racontez-nous votre pain.

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Cookies ultra chocolat aux noix de pécan

Pecan Mudslide Cookies

L’histoire de ces cookies ultra chocolat à New York, où j’ai passé quelques jours début décembre pour la promotion* du dernier livre sur lequel j’ai travaillé, et j’étais logée dans un hôtel qui se trouvait tout près du Chelsea Market.

Cette proximité était bien pratique : j’avais très peu de temps libre pendant ce séjour, mais j’ai quand même pu y faire quelques emplettes personnelles (livres, ustensiles, magazines) et acheter de quoi petit-déjeuner dans ma chambre**. Et juste avant de partir pour l’aéroport, j’y ai aussi acheté un sandwich et un cookie pour l’avion.

Le sandwich, c’était un B.L.A.T. (bacon-laitue-avocat-tomate sur du pain au levain) de chez Friedmans Lunch; le cookie, un gigantesque cookie au chocolat dit mudslide*** au petit stand Jacques Torrès.

Pour cette recette, le Graal consiste à trouver le temps de cuisson qui permettra au centre du cookie d’être encore très fondant pour contraster divinement avec le croustillant des bords, et avec le croquant des noix de pécan et des morceaux de chocolat.

En réalité, c’était le cookie au pépites de chocolat que j’avais en ligne de mire : Torrès est l’un des experts que le journaliste David Leite avait consultés pour son article sur le cookie au chocolat parfait, et le petit démon sur mon épaule gauche espérait convaincre le petit ange sur mon épaule droite qu’il fallait abso-lu-ment goûter ça, au nom de la recherche fondamentale et de l’avancée de la science du goût. (En réalité, mon ange d’épaule est assez fan chocolat, donc il n’y a pas besoin de déployer de tels efforts de persuasion.)

Je n’ai finalement pas mangé le cookie dans l’avion, mais je l’ai rapporté à la maison et partagé avec Maxence. C’était vraiment un cookie format semi-remorque ; il nous a fait quelques repas.

Et il était si bon, si intensément chocolaté, qu’il m’a puissamment aidée à me remettre du décalage horaire et de la fatigue du voyage. Et comme je sentais bien que j’avais encore besoin d’un petit coup de pouce en la matière, je me suis mise en quête d’une recette. Sans aucune difficulté, j’en ai trouvé une sur le site du New York Times, accompagnée d’une petite video de Jacques Torrès himself faisant une démo de la recette, ce qui est toujours un plus.

J’ai réduit la recette aux deux-cinquièmes, pour me caler sur deux oeufs plutôt que cinq, et je l’ai modifiée pour utiliser du simple chocolat noir (la recette d’origine utilise du chocolat à 100% de cacao, mais ce n’est pas un ingrédient franchement courant de ce côté-ci de l’Atlantique), un peu moins de sucre, et des noix de pécan à la place des noix, parce que j’aime ça. Et au lieu de faire huit méga-cookies, selon la taille proposée par la recette, j’en ai fait seize d’une taille qui reste largement satisfaisante, mais qui passe mieux auprès de l’ange.

Pour cette recette, comme pour la plupart des recettes de cookies d’ailleurs, le Graal consiste à trouver le temps de cuisson qui permettra au centre du cookie d’être encore très fondant — tout juste cuit, en fait — pour contraster divinement avec le croustillant des bords, et avec le croquant des noix de pécan et des morceaux de chocolat. Le temps indiqué ci-dessous est idéal pour mon four, mais le vôtre est sans doute différent, donc je vous recommande de faire une fournée de test pour commencer, de surveiller la cuisson attentivement, et de bien noter le temps qui vous convient pour la prochaine fois.

J’insiste sur le fait que ce sont des cookies follement chocolat — plus de 50% de leur poids est composé de chocolat, faites le calcul — et c’est ça qui les rend follement bons, mais ça veut aussi dire que vous avez tout intérêt à choisir avec soin le chocolat que vous utiliserez, puisqu’il sera majoritaire dans le vote gustatif final. (Pour la pâtisserie, j’achète du chocolat de couverture à un prix raisonnable chez G. Detou.)

Et si vous fêtez la Saint-Valentin (nous, non), il me semble qu’une petite boîte de ces cookies, avec un joli ruban bien choisi, devrait faire son petit effet.

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* A cette occasion, j’ai fait une brève apparition télévisée sur le plateau du CBS Early Show, si ça vous intéresse de regarder.

** Le premier matin, j’ai désobéi à ma propre règle de conduite et je suis descendue petit-déjeuner au restaurant de l’hôtel. J’ai commandé (je cite) un « bol de fruits de saison » et on m’a apporté des dés de melon et des framboises. En décembre. {Lève les yeux au ciel.} On ne m’y reprendra plus.

*** Mudslide, en anglais, signifie littéralement coulée de boue et le moins qu’on puisse dire, c’est que ça perd un peu à la traduction. On comprend à peu près l’image, qui est aussi utilisée pour un gâteau très chocolaté, et le mot « mudslide » roule sur la langue d’une façon très agréable, mais à l’évidence, il fallait trouver autre chose en français. Bon, en même temps, certains appellent les truffes au chocolat « crottes en chocolat » et je crois que je préfère encore la coulée de boue.

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