J’écris ceci à la table d’un café où j’aime m’installer quand j’ai du mal à me concentrer à la maison. Pourtant, aujourd’hui, ma bulle est sérieusement mise en péril. A un jet de rondelle de citron sur ma gauche, deux clichés vivants : une directrice de casting française, blonde et rauque, et un jeune réalisateur fraîchement débarqué de LA, barbe en vrac et veste kaki. Ils discutent de l’actrice idéale (cheveux noirs, silhouette généreuse, petit air oriental) pour son prochain film.
Lui est cool comme Fonzie ; elle sature l’espace sonore de sa voix tonitruante et de son accent à couper à la machette. Rien n’y fait, même avec Leonard Cohen qui bourdonne dans mes écouteurs, je ne peux pas ne pas entendre. Et pour être honnête, moi qui me passionne pour les conversations des inconnus, je dois bien reconnaître que celle-ci est particulièrement divertissante, surtout avec imdb à portée de clic. (Si vous êtes une actrice aux cheveux noirs, à la silhouette généreuse et au petit air oriental, faites-moi signe, je pourrai peut-être vous dire ce qu’ils pensent de vous.)
Mais enfin tout ceci n’a que peu à voir avec le sujet du jour. Le sujet du jour, c’est cette salade d’hiver qui, maintenant que j’y pense, a elle-même la silhouette généreuse et un petit air oriental. Elle est inspirée d’une recette de salade de potiron aux pois chiches et au tahini publiée dans Casa Moro, le deuxième panneau du triptyque écrit par Sam Clark et Sam Clark*.
A la lecture de cette recette, j’avais trouvé brillante l’idée du mariage cucurbitacée + légumineuse, et je l’ai mise en musique** dimanche soir, en utilisant le potimarron acheté au marché la veille, une fin de paquet de haricots blancs, du beurre d’amande complet (mon bocal de tahini habite actuellement dans le réfrigérateur de mon voisin, qui me l’a emprunté pour faire du houmous), et une poignée de pignons pour que ça croustille.
Le résultat, c’est cette salade toute douce, très satisfaisante, et particulièrement indiquée quand on est allé courir au parc en fin d’après-midi (suffisamment tard pour que les mouflets aient déserté les allées, mais avant que les arbres ne commencent à faire des croche-pieds à la faveur de l’obscurité).
Je n’avais pas de coriandre (mon maraîcher n’en a pas l’hiver) et j’avais déjà utilisé mon bouquet hebdomadaire de persil, mais si vous avez sous la main quelque herbe fraîche, la salade en frétillera d’aise.
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* Je n’invente rien : le couple à qui appartient le restaurant londonien Moro s’appelle vraiment Sam(uel) Clark et Sam(antha) Clark, Clark étant vraiment le nom de jeune fille de cette dernière. Ionesco aurait adoré.
** Pour voir une version plus proche de celle du livre, vous pouvez consulter celle de mon amie Molly.