Interview

Les Parents qui cuisinent : Aria Beth Sloss

Aria Beth Sloss est l’auteur du roman Autobiography of Us qui vient de sortir en poche aux Etats-Unis.

Elle est aussi mariée à Dan Barber, le chef de génie qui est à la tête de Blue Hill à New York, où ils vivent. Je suis en contact avec Aria depuis que j’ai publié cette interview-frigo de Dan : j’avais annoncé la publication imminente de son roman, et elle m’avait remerciée en me proposant de m’en envoyer un exemplaire, que j’ai lu avec beaucoup de plaisir.

Dan et Aria ont eu une petite fille l’année dernière, et dans l’esprit de ma série Les Parents qui cuisinent, je brûlais de savoir comment leur vie culinaire avait changé depuis sa naissance. J’espère que vous apprécierez autant que moi de découvrir l’approche et les astuces d’Aria, ainsi que les deux recettes qu’elle nous livre plus bas.

Clotilde Dusoulier

Peux-tu nous dire quelques mots sur ta fille ? Son nom, son âge et son tempérament ?

Edith a eu un an le mois dernier. J’ai toujours levé les yeux au ciel quand j’entendais les gens attribuer une personnalité complexe à leurs nouveaux-nés, et l’univers s’est vengé en me donnant une petite fille qui est exactement la même depuis le jour de sa naissance : gaie, déterminée, avec des opinions bien à elle, et très drôle. Je n’aurais jamais imaginé que quelqu’un d’aussi petit puisse me faire rire autant.

Clotilde Dusoulier

Est-ce que l’arrivée de ta fille a changé la façon dont tu cuisines ?

J’ai un peu honte, parce que le changement n’est pas tant dans ma façon de cuisiner que dans le fait que je cuisine tout court. J’ai toujours été plutôt pâtisserie ; mon mari est cuisinier, donc pendant des années ça fonctionnait parfaitement. Et puis cette nouvelle petite personne est arrivée chez nous, et il s’est avéré qu’on ne pouvait pas la nourrir exclusivement de gâteaux et de biscuits.

Quand Edith a commencé la diversification, vers six mois, on a pris le pari un peu fou de sauter l’étape des purées et de lui donner à la place une version modifiée (moins de sel, pas de petits aliments présentant un risque d’étouffement comme les haricots secs, etc.) de ce que nous mangions. [Note de Clotilde : en français, on appelle ça la diversification menée par l’enfant.] Le premier mois, on était toujours un peu sur le qui-vive, mais à part ça, cette approche nous a bien convenu.

Et puis cette nouvelle petite personne est arrivée chez nous, et il s’est avéré qu’on ne pouvait pas la nourrir exclusivement de gâteaux et de biscuits.

Quand mon mari est là pour le dîner, il prépare des plats qui ressemblent beaucoup à ceux qu’il cuisinait avant la naissance de notre fille — des omelettes superbes, des salades avec des céréales et des légumes rôtis, des tartines de fromage frais avec un trait de vinaigre et des herbes fraîches — et on mange tous ensemble.

Pour les soirs où il est au restaurant, j’ai développé quelques recettes inratables : une soupe de lentilles (les bébés aiment la soupe, qui l’eut cru ?), des omelettes moins esthétiques mais acceptables, des toasts à l’avocat écrasé, des patates douces au beurre miso [recette ci-dessous !] et quelques plats simples comme des nouilles soba avec de l’huile de sésame grillé et du brocoli. Et puis j’ai commencé à faire des essais avec la farine de blé germé, qui rend les pâtisseries plus intéressantes sur le plan nutritionnel.

Aria et Edith dans les cuisines de Blue Hill à New York.

Aria et Edith dans les cuisines de Blue Hill à New York.

Clotilde Dusoulier

Est-ce que tu te souviens de ce que c’était que de cuisiner avec un nouveau-né ? As-tu des astuces ou des conseils pour les jeunes parents qui traversent cette phase ?

Mon premier conseil serait : n’épousez pas un chef ! Sinon, votre entourage sera trop intimidé pour vous apporter des petits plats, alors que bien sûr, c’est ce dont tout foyer avec un nouveau-né a désespérément besoin.

Quelques semaines après la naissance d’Edith, un ami qui a un enfant d’un an de plus nous a apporté un paquet de mini brioches de supermarché à la cannelle. « Vous ne les mangerez probablement pas, m’a-t-il dit, mais c’est ce qui nous a sauvé la vie. » Il avait raison : on ne les a pas mangées, mais j’ai été si touchée par le geste que je les ai gardées bien en vue dans la cuisine pendant deux semaines avant de les jeter. Tout ça pour dire que si vous avec des amis ou de la famille qui peuvent vous aider sur ce plan-là, c’est le moment de faire appel à eux !

Mon premier conseil serait : n’épousez pas un chef ! Sinon, votre entourage sera trop intimidé pour vous apporter les petits plats dont vous avez désespérément besoin.

Sinon, soyez indulgents avec vous-mêmes. Je crois beaucoup au plat « moitié fait maison ». Si vous arrivez à mettre des haricots secs à mijoter quelques heures mais que faire cuire du riz est au-dessus de vos forces, commandez-en au traiteur chinois le plus proche (c’est là qu’on est content d’habiter à New York), coupez une tomate en petits morceaux et ajoutez un peu de coriandre.

Si vous n’avez jamais pu finir les sandwiches du déjeuner parce que vous étiez trop occupé à _____ (insérez ici l’activité chronophage de votre choix : frotter des bodys, laver des biberons, vous arracher les cheveux en essayant de monter le transat), découpez-les en jolis petits rectangles façon tea sandwich et complétez avec des épinards ou du bok choy rapidement sautés à la poêle.

On mange rarement de la viande chez nous, ce qui est probablement un avantage quand il faut faire simple et rapide. On est épuisé avec un nouveau-né, mais il faut garder l’esprit clair, et manger sain et léger est le meilleur cadeau que vous puissiez vous faire.

Clotilde Dusoulier

Au fil du temps, as-tu mis au point des recettes ou des stratégies qui te permettent de jongler entre la préparation des repas et ta fille ?

Comme dans beaucoup de domaines de la vie de parents j’imagine, la clé est de s’organiser. Ce qu’il faut éviter, c’est de se retrouver face à une ribambelle d’ingrédients qui demandent beaucoup de préparation, ce dont inévitablement vous ne prendrez conscience qu’au moment où votre enfant se met à hurler de faim.

Les patates douces rôties — notre variété préférée, ce sont les patates douces japonaises blanches à la chair ferme — sont formidables pour ça. On peut les garder au réfrigérateur quelques jours et les faire réchauffer rapidement ; c’est pareil pour les soupes et les plats mijotés.

On a aussi la chance d’avoir une cuisine de restaurant où l’emmener. Elle pourrait observer les cuisiniers de Blue Hill pendant des heures.

Toute la préparation du repas est divertissante pour un bébé un peu plus grand. On a toujours gardé Edith avec nous dans la cuisine, et en général elle est ravie qu’on la porte sur la hanche pour qu’elle voie ce qui se passe dans la poêle ou la casserole. Les ustensiles de cuisine sont aussi des jouets parfaits pour les bébés : les casseroles, les spatules, les tasses à mesurer…

Quand elle était toute petite, j’ai souvent cuisiné avec elle en écharpe, et elle s’assoupissait assez vite. Pendant ce temps-là, je me disais qu’elle s’habituait aux sons et aux odeurs des fourneaux.

Dans notre cas, on a aussi la chance d’avoir une cuisine de restaurant où l’emmener. Elle pourrait observer les cuisiniers de Blue Hill pendant des heures. Ces bruits de casseroles, ces jeunes gens qui s’agitent en tous sens, ces piles de fruits et légumes aux couleurs vives… C’est un drame quand il faut partir.

Clotilde Dusoulier

As-tu déjà trouvé des moyens d’impliquer ta fille dans ta cuisine ?

A mon sens, l’implication en cuisine est une question de proximité : même si un enfant n’est pas directement en train de cuisiner, le fait d’être dans les parages est probablement suffisant pour éveiller sa curiosité et poser les fondations de sa culture culinaire. Pour ma part, j’attribue mon amour de la cuisine aux nombreux après-midis que j’ai passés dans ma chaise haute pendant que ma mère préparait le dîner.

J’attribue mon propre amour de la cuisine aux nombreux après-midis que j’ai passés dans ma chaise haute pendant que ma mère préparait le dîner.

C’est excitant à regarder, toute cette activité, et comme il y a des odeurs et des saveurs, c’est mille fois plus intéressant que la télévision. Au restaurant, je me dis qu’elle est triplement exposée, puisqu’il y a encore plus de cuisiniers, d’ingrédients, d’odeurs, sans parler de l’énergie tourbillonnante qui règne dans une cuisine professionnelle. J’ai hâte de pouvoir lui mettre une petite veste de chef et de la faire participer.

En attendant, quand je cuisine, j’essaie de lui proposer un ingrédient qu’elle peut grignoter — une lamelle d’avocat si je fais des toasts à l’avocat, un bâtonnet de patate douce si je fais mijoter des légumes, un morceau de poire mûre qui fera notre dessert. Moi-même, je goûte tout en cuisinant, donc ça me paraît normal de lui en faire profiter aussi.

Clotilde Dusoulier

Peux-tu nous parler des joies et des difficultés que tu as rencontrées en nourrissant ta fille, et en essayant de lui apprendre à être une mangeuse heureuse et audacieuse ?

J’ai été émerveillée de voir à quel point il est gratifiant de voir Edith manger. Je crois que ça touche à quelque chose de très profond dans la parentalité que ce soit un tel plaisir de voir son enfant manger avec bonheur quelque chose qu’on a préparé.

J’espère que je vais réussir à garder une approche assez détendue de ses habitudes alimentaires. On a décidé assez tôt de ne jamais 1) la forcer à manger quoi que ce soit, ni 2) organiser les repas autour de ses prédilections, et je crois que jusqu’ici ça a grandement contribué à faire de nos repas des moments joyeux et agréables pour tous.

On a pris l’habitude d’incorporer une large palette d’ingrédients et de saveurs dans les plats les plus simples.

J’ai aussi pris sur moi de la laisser se nourrir seule depuis le tout début. J’y croyais sur un plan intellectuel et pseudo-psychologique — pourquoi ne pourrait-elle pas prendre dès le début une part active dans son alimentation ? — tout en me disant que ça pouvait être un désastre monumental en pratique. Mais ça a été génial ! Ce n’est pas toujours joli à voir, certes, mais j’ai trouvé des bavoirs qui sont pratiquement des combinaisons de protection intégrales, et on y va gaiement. Ça peut paraître bizarre, mais quand on réfléchit aux six mois qui viennent de s’écouler, mon mari et moi-même avons l’impression que la meilleure chose qu’on ait faite pour l’alimentation d’Edith, c’est de la mettre aux commandes.

On a aussi pris l’habitude d’incorporer une large palette d’ingrédients et de saveurs dans les plats les plus simples. Par exemple, je fait régulièrement cuire une grande quantité de flocons d’avoine qui nous fait quelques petits déjeuners. Quand j’en fais réchauffer, j’ajoute un trait de lait d’amande, une pincée de cannelle [sc:cinnamon_link] et un peu de gingembre râpé. Le restaurant de mon mari a lancé une ligne de yaourts salés, et j’en ajoute souvent une cuillerée — celui au panais est notre préféré en ce moment. Ce sont des goûts assez forts, mais elle adore.

Je mets un peu de curry et de lait de coco dans la soupe de lentilles que je lui donne [recette ci-dessous !], une pincée de paprika dans l’avocat écrasé, du persil haché sur une tartine de ricotta. Un autre exemple, c’est les céréales : j’ai remplacé la farine blanche par de la farine complète germée pour certaines des recettes de muffins qu’elle adore dans ce livre, et mon mari rapporte du restaurant du sarrasin et du farro [Note de Clotilde : c’est une sorte d’épeautre] qu’on met dans les soupes.

J’ai tendance à penser que les enfants sont beaucoup plus ouverts qu’on ne le croit. Et si on ne leur représente pas le monde des saveurs dans ce qu’on leur sert, comment pourraient-ils réaliser combien ce monde est vaste et passionnant ?

Edith

La Soupe de lentilles d’Aria

J’aime bien utiliser les toutes petites lentilles noires beluga, mais bien sûr on peut prendre n’importe lesquelles. J’utilise du bouillon quand on en a, mais sinon je mets de l’eau salée, dans un ratio liquide/lentille de 2 pour 1. Comme je ne suis pas dingue d’oignons, je coupe un oignon en quatre, je le fais cuire avec les lentilles, et je l’enlève quand les lentilles sont tendres. A la fin de la cuisson, j’ajoute l’un des ingrédients suivants : une pincée de cannelle et une pincée de curry, ou une petite cuillerée de très bonne harissa, ou une cuillerée de lait de coco et un peu de piment en poudre.

Les Patates douces au miso d’Aria

Faites rôtir des patates douces japonaises jusqu’à ce qu’elles soient tendres. Pelez et coupez en rondelles. Pour Edith, je les coupe en bâtonnets pour qu’elle puisse les tenir facilement. Dans une petite poêle, faites fondre une noix de beurre jusqu’à ce qu’il commence à mousser, et ajoutez une cuillerée de miso blanc assez doux. Mélangez doucement jusqu’à ce que le miso ait fondu, puis faites sauter rapidement les patates douces dedans en les tournant pour qu’elles soient bien recouvertes.

Les Parents qui cuisinent : Lucy Baluteig-Gomes

Lucy Baluteig-Gomes est la créatrice française de Rose la Biche, une ligne de vêtements à la fois faciles à porter et poétiques, ornés de cascades de pétales, de cols froncés, ou de plastrons en tulle.

Lucy et moi nous connaissons depuis des années — depuis une rencontre C&Z à San Francisco en 2006 — et j’ai suivi ses aventures lorsqu’elle a quitté la Californie pour rentrer à Paris, avant de repartir pour Barcelone où elle vit aujourd’hui. Lucy a deux enfants qui sont encore petits, et je suis ravie de l’accueillir pour ma série des Parents qui cuisinent.

Clotilde Dusoulier

Peux-tu nous dire quelques mots sur tes enfants ? Leurs noms, leurs âges et leurs tempéraments ?

J’ai deux enfants. Oscar, un garçon de 6 ans, et Brune, une fille de 3 ans. Deux caractères totalement différents, ce qui ne les empêche pas d’être très complices.

Oscar est un enfant doux et sensible, posé et responsable. Très sociable, il adore faire le clown pour faire rire les gens et ne supporte pas l’injustice. On s’amuse souvent à dire qu’il faudrait lui remettre le Prix Nobel de la Paix !

Brune est une petite fille vive, espiègle et battante, pleine d’énergie avec un caractère bien trempé. Elle a déjà compris qu’un de ses sourires peut faire craquer n’importe qui, et elle sait en jouer habilement pour obtenir ce qu’elle veut !

Clotilde Dusoulier

Est-ce que l’arrivée de tes enfants a changé la façon dont tu cuisines ?

Pas vraiment. Une fois la phase « bébé » passée, j’ai très rapidement fait en sorte de ne préparer qu’un seul repas pour tout le monde. D’abord par souci de praticité, mais aussi parce que je tiens à ce que le moment du repas soit partagé : c’est mon côté tradi ! On parle des légumes ou des épices utilisés, on commente si on aime ou pas, et puis on discute aussi de la journée de chacun. C’est vraiment un moment qui m’est cher où je fais en sorte que l’on se retrouve tous les quatre assis ensemble le plus souvent possible, quitte à dîner tard.

Et puis je viens du Sud-Ouest : on ne rigole pas avec la nourriture dans ma famille, on adore cuisiner, et absolument tout tourne autour de ça ! Du coup, j’ai plutôt légèrement adapté certaines de mes recettes au niveau de la présentation pour les rendre plus attrayantes pour les enfants (le poisson sous forme de boulettes par exemple) ou pour les réaliser plus rapidement (un risotto en 9 minutes dans ma cocotte minute). C’est vrai que je suis toujours à la recherche d’astuces ou techniques pour varier et gagner du temps, mais dans l’ensemble, je n’ai pas vraiment changé la façon dont je cuisine.

Lucy's children

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Les Parents qui cuisinent : Matthew Amster-Burton

Matthew et Iris
Matthew et Iris devant Kawajiro, un restaurant de brochettes d’anguilles à Tokyo.

Permettez-moi de vous présenter Matthew Amster-Burton, mon nouvel invité pour la série des Parents qui cuisinent.

Matthew est une plume de talent dont j’adore l’humour, et qui écrit aussi bien sur les finances personnelles que sur la cuisine (ses articles ont été inclus dans pas moins de cinq éditions de l’anthologie annuelle Best Food Writing).

Il co-anime le podcast Spilled Milk avec Molly Wizenberg, et il est l’auteur du livre Hungry Monkey: A Food-Loving Father’s Quest to Raise an Adventurous Eater, et du récent Pretty Good Number One: An American Family Eats Tokyo.

Pretty Good Number OneMatthew a une fille de neuf ans, et comme vous pourrez le constater, son approche est ludique, détendue et pleine d’astuce. J’espère que ses réponses vous plairont autant qu’à moi.

Peux-tu nous dire quelques mots sur ta fille ? Son nom, son âge et son tempérament ?

Iris a neuf ans, et c’est une enfant très facile. Elle aime aller à l’école et on s’entend bien. J’en profite pendant que ça dure.

Est-ce que l’arrivée de ta fille a changé la façon dont tu cuisines ?

Oui, en mieux et en moins bien. Je suis devenu beaucoup plus fiable, et on peut maintenant compter sur moi pour préparer à dîner et que ce soit prêt à une heure raisonnable. Je suis aussi moins enclin à cuisiner un plat compliqué qui prend la journée : pendant des années j’étais trop fatigué, et une fois mon énergie retrouvée, je me suis aperçu que ça ne me manquait pas, donc j’ai continué à cuisiner surtout des choses simples. Cela semble être le cas pour de nombreux parents.

Le côté négatif, c’est que je compose probablement un peu trop avec les goût d’Iris. Il y a des plats que j’aimerais bien servir, mais je sais qu’Iris les détesterait. Ils sont quand même de moins en moins nombreux à mesure qu’elle grandit. Par exemple, récemment, elle a décidé qu’elle aimait à nouveau les choses épicées après les avoir abandonnées à l’âge de deux ans. Donc le curry thaï a de nouveau droit de cité, enfin !

Est-ce que tu te souviens ce que c’était que de cuisiner avec un nouveau-né ? As-tu des astuces ou des conseils pour les jeunes parents qui traversent cette phase ?

Presque tout ce qui touche au fait d’avoir un nouveau-né est terrible. Mon conseil : si quelqu’un vous propose de vous apporter à manger, dites oui ! Personne ne devrait culpabiliser pour ce qu’on fait pour survivre aux trois premiers mois d’un bébé.

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Les Parents qui cuisinent : Camille Labro

Camille, Cléo, Noé
Camille Labro avec Cléo, 6 ans, et Noé, 8 ans.

Camille Labro est journaliste culinaire (pour M le magazine du Monde) et cuisinière. Sur son blog, Le Ventre libre, elle raconte ses jubilations et tribulations gustatives, et explore toutes sortes de manières de manger mieux, en ville, aujourd’hui.

Camille est la mère de deux enfants, et je suis ravie de l’accueillir pour ma série d’interviews de Parents qui cuisinent. Lisez plutôt, ça fourmille de bonnes idées !

Peux-tu nous dire quelques mots sur tes enfants ? Leurs noms, leurs âges et leurs tempéraments ?

Noé, 8 ans, adore lire, manger, faire du vélo et du roller. Cléo, 6 ans, adore lire, manger, danser et dessiner. Ils sont tous deux très sociables, aventuriers en goût comme en expériences, toujours pleins de questions existentielles, et très jaloux des repas gastronomiques que je fais sans eux, dont ils dévorent les photos en me traitant de tous les noms.

Est-ce que l’arrivée de tes enfants a changé la façon dont tu cuisines ?

Pas vraiment, mais cela m’a structurée, et obligée à cuisiner plus régulièrement et réfléchir aux qualités nutritionnelles des repas. Je me suis fait une loi, depuis qu’ils mangent de tout, de faire des dîners équilibrés, qui comptent toujours une petite entrée (généralement un légume cru), un plat (protéine + glucide + légume), et un dessert très simple (laitage ou fruit).

Est-ce que tu te souviens ce que c’était que de cuisiner avec un nouveau-né, ou en tout cas un bébé très petit ? As-tu des astuces ou des conseils pour les jeunes parents qui traversent cette phase ?

Quand mes enfants étaient petits et que j’allaitais (je les ai allaités chacun pendant 9 mois), je ne travaillais pas ou très peu, j’avais donc pas mal de temps pour cuisiner. Je mettais le bébé dans son transat à côté de moi et je lui racontais ce que j’étais en train de préparer. En général, il m’écoutait avec beaucoup d’attention, et il aimait bien les mouvements, les bruits, les odeurs (c’était mieux qu’un mobile !). Et s’il s’impatientait, je lui donnais un bâton de carotte à sucer ou un croûton de pain à rogner…

Sinon pour les parents qui travaillent, l’astuce principale, je pense, c’est de préparer beaucoup de choses à l’avance. Prendre une journée par semaine, le dimanche par exemple, pour faire le marché puis cuisiner plein de plats qu’on congèle : plats en sauce, soupes, gratins…

Et puis, il y a des choses très simples à faire, comme mettre des petits steaks ou des filets de poisson au congélo, emballés individuellement (il n’y a plus qu’à sortir le nombre qu’on veut le matin, pour qu’ils soient décongelés le soir), préparer du pesto dans des bacs à glaçons (on compte un « glaçon » de pesto par personne pour une pasta), bien laver et sécher tous ses légumes, fruits, salades et les emballer au frigo pour qu’ils soient rapides à utiliser. Il faut un peu de logistique pour se décharger durant la semaine.

Quant aux dîners « sociaux », difficile de faire ça quand on est jeunes parents… Mais on peut toujours inviter ses amis… à venir faire le dîner ! J’ai pas mal fait ça quand j’étais débordée : tu aimes faire la cuisine? Viens manger chez moi, je m’occupe des courses et du couvert, tu cuisines pendant que je m’occupe du bébé. Ça peut être aussi à plusieurs, avec d’autres jeunes parents, et on se relaie aux fonctions. C’est en général très sympa, convivial et solidaire!

Camille Labro
Camille Labro, photographiée par son fils dans sa cuisine.

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Les Parents qui cuisinent : Tamami Haga

Tamami de Coco & Me
Tamami Haga, photographiée par Andy Andrews.

Tamami Haga est une Londonienne japonaise et une pâtissière passionnée qui tient un stand au Broadway Market de Hackney, East London. Elle est également l’auteur du très joli blog Coco & Me, que je lis depuis des années et qui combine des anecdotes de sa vie de pâtissière et des recettes délicieusement précises. J’aime beaucoup ses Brownies de luxe en particulier. Elle travaille en ce moment sur son premier livre de cuisine.

Tamami a deux enfants, et je suis ravie de l’avoir comme invitée pour ma série d’interviews Les Parents qui cuisinent. J’espère que vous réserverez à Tamami un accueil chaleureux ! (Entretien mené en anglais et traduit par mes soins.)

Peux-tu nous dire quelques mots sur tes enfants ? Leurs noms, leurs âges et leurs tempéraments ?

Mon fils Issei a neuf ans et ma fille Sakura en a quatre.

Issei est un garçon gentil et sensible qui fera une moue de désaprobation s’il voit un papier sur le trottoir et qui le ramassera pour le jeter à la poubelle. Il est aussi très futé.

Sakura est une petite fille très drôle qui adore inventer ses propres paroles sur des airs connus. Elle dessine très bien. Et comme elle est japonaise, elle dit beaucoup « Trop mignon ! » et « Kawaii ! »

Est-ce que l’arrivée de tes enfants a changé la façon dont tu cuisines ?

Oui, ça a complètement changé ! Quand j’étais célibataire, je me fichais complètement de cette histoire de cinq fruits et légumes par jour. Je ne prenais jamais la peine de petit-déjeuner par exemple. Imaginez une jeune femme d’une vingtaine d’années allant boire des bières au pub en sortant du bureau… c’était moi !

Mais maintenant, évidemment, il ne s’agit plus de manger n’importe quoi n’importe quand. J’essaie constamment de préparer des vrais repas pour la famille. Mais de toute façon, je ne trouve pas ça ennuyeux ni fatiguant de cuisiner : je fais en sorte de me renouveler avec de nouveaux ingrédients, de nouvelles techniques ou de nouvelles recettes. Le weekend dernier, j’ai cuisiné de la joue de boeuf pour la première fois. Je l’ai fait mijoter doucement pendant deux heures et le résultat était incroyablement fondant.

Mais il arrive que ce soit raté, et que mes enfants ne veuillent pas manger ce que j’ai préparé. Mais on commente ensemble et ils me disent toujours : « Bravo Maman d’avoir essayé. » Je me dis alors : « Au moins j’ai essayé » et au moins ils voient que j’aime bien relever des défis. J’espère que cette façon de repousser ses limites et de ne pas abandonner est un bon exemple pour eux.

Sakura
Sakura, 4 ans, avec un beignet maison en forme d’ourson

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