Pour ce nouveau billet de notre série Dessine-moi un frigo (tous les détails ici), nous avons rencontré le chef américain Dan Barber.
Dan Barber est le chef d’un de mes restos préférés au monde, Blue Hill à New York, et d’une ferme-restaurant au nord de New York, Blue Hill at Stone Barns, auquel je rêve d’aller depuis des années. C’est l’une des figures de proue de la scène culinaire nord-américaine, il intervient activement sur les questions d’éthique et d’alimentation durable, et il manie avec autant de talent les ingrédients et les idées.
J’ai récemment eu l’opportunité de le recontrer à Paris, où il avait été invité par Alain Ducasse pour cuisiner un déjeuner spécial au Plaza Athénée. Alexia Colson-Duparchy, à qui l’on doit la série Dessine-moi un frigo sur Chocolate & Zucchini, m’a rejointe, et nous avons parlé avec lui de breeding, de cuilllères, et d’oeufs sur le plat.
Ces derniers temps, j’ai consacré beaucoup de temps au breeding [processus de sélection par lequel on améliore une race d’animal ou une variété de végétal]. Il ne s’agit pas de manipulations génétiques, mais de sélection naturelle menée avec des techniques modernes qui permettent d’aller plus vite, pour atteindre les résultats recherchés en deux ans plutôt qu’en cent.
Beaucoup de chefs et de gens qui aiment manger veulent retourner vers les graines anciennes, ce qu’on appelle en anglais les heirlooms [littéralement, objets de famille dont on hérite de génération en génération]. Mais ce qui m’intéresse, c’est d’utiliser cette génétique du passé et l’emmener vers le futur. Une variété ancienne signifie qu’on s’arrête à un moment précis : quelqu’un dit, c’est une super tomate, donc on arrête, et on transmet les graines. C’est peut-être une tomate fantastique, mais je pense qu’on peut faire mieux. Je sais qu’on peut faire mieux. Il faut utiliser ce patrimoine génétique et travailler avec des sélectionneurs pour se concentrer sur le goût et la résistance aux maladies. C’est très important pour les agriculteurs.
Le déjeuner de demain illustre cette idée. Pour chaque plat, nous avons apporté des ingrédients à mettre en avant. Le blé me tient particulièrement à coeur parce que je travaille de très près avec un sélectionneur de blé. Il y aura aussi de la celtuse, une variété de laitue. On a travaillé dessus avec un autre sélectionneur et on l’a plantée dans du tourteau de noisettes, ce qui lui a donné un goût de noisette. C’est formidable.
Habituellement, j’utilise des ingrédients locaux, mais là, le thème du déjeuner me semble plus important.